mardi 19 avril 2011

Le chagrin de mon chagrin

Et JB veut traduire la phrase suivante ainsi:
Commence alors la période où c'est moi contre le monde entier.

JB n'est pas peu fier de sa solution, il trouve que ça sonne bien et tout, que le rythme est bon. Ouais, pas mal, songe-t-il, enfoncé dans son fauteuil, la clope au bec, avec cet air un peu imbuvable du type sûr de lui et fat sur les bords comme les côtés.

Jusqu'à ce qu'il lise et relise et que sa satisfaction fonde comme neige au soleil.
Parce que, parlant de rythme et de sonorité, patin couffin, ça commence à vibrer et résonner sec dans son cerveau compliqué.
Et qu'est-ce qui résonne?
Ça:



Oh naaan…, fait-il en craillant une riveure. Pas Cloclo sur ma phrase favorite!
Et surtout pas "le chagrin de mon chagrin"!!!
Il se triture les méninges qu'il a tavelées de six taches blanches [méninge est féminin, correspondant ainsi au latin meninga, et se disait aussi miringue en moyen français], et il finit par trouver une solution qui lui va:
Commence alors la période où je me bats contre le monde entier.
Et là ça plaît doublement à JB parce que ça rappellerait presque "C'est la lutte finale!"
Et buenas noches, hein.



PS: En parlant de miringue en moyen français, JB a trouvé dans le Godefroy un magnifique exemple de description desdites miringues. Et woilà:


PS2: En moyen français, le participe présent [ici: "montentes"] s'accordait encore en genre et et nombre, mais la règle était floue dans son application. Le Grevisse nous explique:
L'ancienne langue faisait varier le participe présent en cas et en nombre, mais non en genre, parce que ce participe appartenait à la catégorie des adjectifs ayant une forme unique pour les deux genres. Du XIIe au XVIIe siècle, quoique les adjectifs dont il vient d'être parlé prissent, par analogie, un e au féminin, les participes présents ont maintenu, en général, leur invariabilité. Cependant, on faisait parfois l'accord en genre: "J'aime la bouche imitante la rose" (Ronsard). Au XVIIe siècle, cet accord, comme d'ailleurs l'accord en nombre, quoique condamnés par Vaugelas puis par l'Académie (3 juin 1679), sont encore assez fréquents: "Nos devoirs nous obligeans d'aymer Dieu et nos concupiscences nous en détournantes" (Pascal).

Claude Muller, professeur à l'université de Bordeaux 3, est un peu plus partagé et plus explicite — en tout cas nous explique de façon plus claire:
Le français classique pratiquait aussi bien l'accord en nombre avec un sujet sémantique extérieur à la proposition qu'avec un sujet propre: "Les principaux de la cour, voyans l'occasion favorable, se levèrent." (Vaugelas, cit. Haase, §91); qu'avec un sujet propre (de façon peu cohérente, le dernier n'est pas accordé): "Il faut qu'il y ait différens degrés, tous les hommes voulans dominer et tous ne le pouvans pas, mais quelques-uns le pouvant" (Pascal, pensées, id.) Les noms au féminin pluriel ne s'accordaient le plus souvent qu'au pluriel: "Ayans cette persuasion en leurs caboches, elles feront leurs mariz coquz infailliblement." (Rabelais, III) Cependant, l'accord a pu aussi se faire: "(…) elle s'excusoit, alleguante que ce n'avoit esté de son consentement." (Rabelais, II; cit. D.P. § 1199) Cet accord se raréfie* après le XVIIe siècle dans les emplois verbaux du participe (ordonnance de l'Académie française du 3 juin 1679).
*En italien, le participe présent, distinct du gérondif, s'accorde: "Cercasi guida parlante giapponese."

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