dimanche 10 avril 2011

L'atome, le dub et la diarrhée

Et, vendredi dernier, à la fois sans doute lassés d'observer les joueurs de billards se divertir avec leurs queues et leurs boules, plutôt émoustillés par un nighter dont ils avaient oublié l'existence et qui se situait vraiment à deux pas, G et JB se précipitaient donc au TiK où, très vite, résonnaient les accords envapés typiques du dub et du dancehall. "C'est vraiment une soirée de meks", pestait G. De fait, non seulement un jeune homme au crâne quasi hydrocéphale, que JB identifiait illico comme un étudiant en mathématiques (G dirait: "en ethnologie"), crachait dans le micro tel un U Roy du XXIe siècle, mais des garçons étaient agglutinés près de lui et des platines. Ce qui poussait JB à expliquer la signification en français de la locution "comme la vérole sur le bas clergé" dont le TLF la livre sur ce blog tatoué et fumeur aux petits amis de JB revient (et ce dernier ne peut forcément que s'amuser de l'exemple littéraire choisi dont il souligne et bleuit le sujet):

 (S'abattre, tomber) comme la (petite) vérole sur le bas clergé. [En parlant d'un ennui, d'un désagrément] (S'abattre) violemment et subitement (comme le ferait une épidémie). Les héritières aryennes (...) vont fondre sur toi telle la vérole sur le bas clergé, proverbe dont ton père use jusqu'à l'élimer comme une vieille culotte (M. CerfUne Passion, 1981, p. 39).

Et le Robert des expressions et locutions de nous expliquer que la métaphore, dont le bas clergé en question peut être, dixit, "espagnol ou — plus tard — breton (…) reflète l'anticléricalisme mêlé au mépris hiérarchique". Certes. Mais pourquoi précisément la vérole? et pourquoi précisément en Bretagne et en Espagne?
Le site expressio est plus disert:


Bref, dans ce lieu et cette ambiance où les vapeurs haschichines le disputaient aux vapeurs d'alcool (et JB de se voir contraint d'user de sa sale cheutron de méchant skinhead pour repousser les insistances d'un gugusse aux veines distillées à la bière), a résonné tout à coup la version dub d'un morceau de Massive Attack. Et ce devait, se dit JB aujourd'hui dimanche, Spying Glass, de 1995:



Et JB de le faire remarquer à G: "Oh, c'est Massive Attack…!" Comme G répond que Massive Attack, outre les morceaux les plus connus, lui demeure très vague, JB promet de lui bricoler une compil. Ce qu'il fait en ce dimanche. JB ressort donc son CD No Protection, de 1995, dans lequel Mad Professor remixait en dub 8 des 10 morceaux qui constituaient l'immarcescible Protection sorti la même année. Il les écoute et son oreille s'arrête sur onze secondes d'Eternal Feedback, la version dub de Sly:



Et ce qui interpelle JB dans cette phrase musicale, ce sont bien sûr les accords de melodica qui se superposent aux nappes électroniques évoquant un ruissellement, elles-mêmes ponctuées par des notes de de violon. L'ensemble est hétéroclite et donc étonnant.
Séduit comme d'habitude par les inventivités de Massive Attack, JB prend soudain conscience qu'il n'a jamais écouté l'album Heligoland, sorti l'an passé. Pourquoi? se demande-t-il. La réponse est toute trouvée.
Et donc JB écoute ce disque qu'il trouve vraiment vraiment impeccable (hormis les morceaux avec Martina Topley-Bird qu'il goûte moyennement). Mais une chanson en particulier, où intervient notamment encore une fois Horace Andy (c'était lui qui chantait sur Spying Glass), retient son attention: Splitting The Atom:



Car, de fait, nom seulement la chanson prend une valeur inédite depuis le 11 mars 2011, mais, pas plus tard que mercredi dernier, G envoyait à JB une vidéo japonaise intitulé Nuclear Boy qui explique aux enfants ce qui s'est passé à Fukushima. En usant d'une métaphore bien singulière, littéralement pipi-caca-prout. On regarde et on se fend la poire:



Hö hö hö!
Mais ce dont s'étonnait JB, en… indécrottable (! re-hö!) traducteur, c'était justement la traduction en anglais et notamment ce syntagme pour le moins surprenant, stomach issues:


Des stomach issues???
Pardon?
Autrement dit, des affaires stomacales.
C'est un joli euphémisme pour retranscrire ce que la vidéo explique plus prosaïquement à un autre moment:


JB rassure ses petits amis, il ne va pas gloser sur la diarrhée. (Et il entend des ouf de soulagement des deux côtés du Rhin).
Non, JB est surpris par ces coïncidences dont il raffole tant. Il fait une compil de Massive Attack pour G et s'émerveille du morceau Splitting The Atom et, quelques plus tôt, G lui envoyait une vidéo sur l'atome. Une certaine boucle forcément hélicoïdale est bouclée.

Ou pas tout à fait.
Car JB est surpris. Il se souvient que, il y quinze jours, il confiait sa tête compliquée à un cartographe cérébral. Le bruit de la machine était si assourdissant malgré les protections que l'homme en blanc avait apposées contre ses oreilles. Plus les bruits continuaient, somme toute assez répétitifs, plus JB se croyait dans un morceau de Massive Attack, Superpredators, remixé par Mad Professor en 1997. Encore Massive Attack, encore l'atome, encore le dub:



Et c'est doublement étonnant. Car, alors même que JB écrit ce post, le ciel est d'un bleu pastel monochrome et le soleil irradie en ce dimanche. Ses rayons se reflètent sur la boule à facette qui elle-même réverbère de petits cercles blancs disséminés sur le plafond du palais socialiste de JB. Et ce dernier, observant les espèces de coruscations ainsi formées, se dit que ces réflexions aubes sont semblables aux étranges taches neigeuses révélées par la cartographie cérébrale. S'il trafique la photo, il obtient une image d'une similitude confondante:

© icke

Et, comme Debbie Harry l'autre jour (puisque, oui, c'était elle avec Iggy Pop), JB pourrait ainsi s'écrier:



Mais il préfère citer ses chouchous de Feeling B, les pounk de RDA qui, dans le morceau Langeweile, parlaient de Marie Curie et qu'"elle voulait atteindre l'atome et séparait les particules" (comme Massive Attack trente plus tard), "uniquement par ennui":



Et sur ce, histoire de rompre l'ennui, JB va aller manger. Manger est toujours réconfortant. Babaille!

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