La banquette au tissu rêche, le revêtement marron. Assis là, je regarde les autres ambulanciers. Ils lisent leur journal, tournent le bouton de la radio, essaient de capter les informations mais l’antenne, récalcitrante, refuse de se tenir à la verticale et s’affale d’un côté ou de l’autre dès qu’on la lâche. Il est sept heures et demie du matin, nous sommes un mardi, un mardi matin de février, et il y a tant de gens à sauver, tant de gens allongés par terre qui attendent, tant de gens étendus qui fixent le plafond ou gardent les yeux fermés ; ils tentent d’ignorer les douleurs qu’ils ont dans le dos, dans les jambes, le long des bras, leurs problèmes de respiration, ou bien ils sont en état de choc, se sont retranchés dans une forme d’apathie, se foutant bien de savoir si oui ou non quelqu’un va venir alors que si, évidemment, quelqu’un va venir les sauver, même toi nous allons venir te sauver, nous réussirons à maintenir l’antenne droite, nous lirons nos journaux, boirons notre café, et tu finiras par être découvert, quelqu’un décrochera son téléphone pour nous parler de toi, nous prendrons nos vestes, nous courrons vers les ambulances et nous viendrons te chercher, t’extraire de la pièce où tu es, nous te remettrons d’aplomb, te donnerons tout ce que tu veux récupérer, mais d’abord, d’abord il faut que tu sois découvert. Il faut que tu tiennes bon, où que tu sois.
© Ambulance, Johan Harstad, traduit par Jean-Baptiste Coursaud, Gaïa Éditions, 2005
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