vendredi 4 juin 2010

Le suppo et le suppôt

Règle d'or 128 prime du traducteur:
NE PAS TROP S'IDENTIFIER AVEC LE TEXTE.
S'identifier un peu pour avoir suffisamment d'empathie avec le texte et l'apprécier afin, au bout du compte, de trouver les mots justes (on traduit mal ce qu'on aime mal).
Mais éviter la symbiose avec ce même texte sans quoi on finit comme une carpette détrempée sur un sol cradingue que personne n'a jamais pris ni le soin ni le temps de laver.

Exemple: le passage ci-dessous.
Contexte: une jeune femme veille une dame âgée sur son lit de maison médicalisée.
Je me penche sur elle, je caresse ses cheveux blancs et l’embrasse sur le front. Il est froid et moite. Elle va bientôt mourir. J’espère qu’elle mourra avant Borghild. Je serais trop contente comme ça de pouvoir boire une petite bière avec Truls. Tiens, il se passe quelque chose… Elle écarquille les yeux et se met à agiter les bras. Un bruit sort de sa bouche. Un bruit atroce, auquel je ne m’attendais pas. Je lui la prends la main, la tiens, mais elle sert tellement fort que ça me flanque la frousse
Et ensuite?
Et le point?
Pas de point. Pas d'ensuite. Panne.
Besoin de reprendre son souffle.
Allez, c'est comme un suppositoire, c'est désagréable à mettre mais ça fait du bien après.

La traduction comme suppo, le traducteur comme suppôt de Satan.
Pff…


21h46
Et voilà la suite:
. Je tressaille au moment où un sursaut agite sa tête. Oh là là, je viens de pousser un petit cri… Ça y est, elle ne bouge plus du tout. Je soulève le poignet de Solvei, avec prudence et délicatesse, je tâte son pouls, tout mon corps est prêt à tressauter si jamais elle venait à faire le moindre mouvement. Mais il n’y a pas de pouls. Je regarde l’heure. Il est trois heures moins le quart. On va bientôt être convoqués pour le rapport. Mon cœur se calme. Il a battu à toute allure mais maintenant il se calme. Et j’éprouve de la joie. Elle est morte. J’ai gagné le pari. Je ne peux pas m’empêcher de sourire. Des larmes coulent le long des tempes de Solvei. Bizarre… Comme si elle était triste de mourir, ou triste de quitter ce monde. Et du coup ça me fout le cafard à moi aussi.

Bon, allez, moi je plie les gaules pour aujourd'hui et je vais au nighter.
Tchao la compagnie!

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