vendredi 11 juin 2010

Les pies

On est réveillé par deux pies extrêmement bruyantes, qui ne cessent de jacasser à tue-tête, qui volent des branches du marronnier en agitant le feuillage puis viennent se poser sur le toit de l'école où leurs pattes font tap tap tap sur le revêtement en tôle. On se dit qu'elles doivent être très amoureuses. Et si on savait depuis longtemps que les pies évoluent toujours par deux, on a observé leur comportement avec un œil plus acéré depuis qu'on vit à Berlin. On a assisté un jour aux cris déchirés d'une pie esseulée qui appelait sa moitié. On a remarqué que la pie vient systématiquement farfouiller dans le sac à compost sur le balcon dès qu'il y a des coquilles d'œuf. Et au final on n'a pas compris pourquoi la pie avait si mauvaise presse dans la croyance populaire. Éberlué mais conforté, on apprend de plus que la pie est l'un des rares animaux, en tout cas le seul oiseau, à avoir réussi le test dit du miroir, qui mesure le degré de conscience de soi chez les animaux: chimpanzés, bonobos, orang-outans, éléphants, dauphins, orques et donc nos amies les pies finissent par se rendre compte, ou, pour le coup: par prendre conscience que le reflet dans la glace n'être autre leur propre image et non celle d'un(e) congénère. Et cela nous fait évidemment penser à cet extrait d'un texte de Geneviève Brisac qu'on a heureusement retrouvé, et qu'elle avait écrit à l'occasion de "sa semaine" dans Libération en 2007:

Le temps des rêveurs fraternels reviendra peut-être. Mais quand? La pie s'en balance. A huit heures trente chaque matin, elle se balance, au son de la revue de presse, sur la branche de hêtre rouge devant ma fenêtre. Le soleil éclatant fait scintiller son plumage. Je suis sa seule amie. Tout le monde déteste les pies. Si j'annonçais qu'un pingouin nous visite tous les matins, vous verriez les mines passionnées. Tout le monde aime les pingouins et méprise les pies. Hé bien, permettez-moi de rétablir un peu de justice, et de prendre le parti de l'oiseau chanteur et si souvent calomnié.

Du coup, on repense à ce morceau de Bongo Herman, Reggae With The Birds, qui est une énième variation de l'illustrissime Liquidator des Harry J. All Stars et on se dit que ça fait des luuustres qu'on promet sur ce blog tatoué et fumeur de présenter la fortune musicale que ce morceau a générée. Reggae With The Birds, de 1972, est en fait la version instrumentale (qui, par voie de conséquence, fait ressortir les roucoulements des oiseaux) de Chairman Of The Board, elle-même parue en face B du Liquidator et plus dancehall. On écoute - et une bonne journée, hein.

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