mercredi 30 juin 2010

The Golden Girls in Berlin (2)

WM/Mondial: Portugal (a sequel)

Et si on est bien content que le Portugal soit éliminé, on pense évidemment à la magnifique et implacable écriture désespérée de Fernando Pessoa, lui qui disait, dans le Livre de l'intranquillité: "On dirait que je cherche, à tâtons, un objet caché je ne sais où, et dont personne ne m'a dit ce qu'il est."

Et ce substantif, intranquillité, il n'existe pas en français - du moins à en croire les dictionnaires qui ne l'ont toujours pas ni reconnu ni accepté ni inclus (que fait la police?!). Voici par exemple ce que nous dit le TLF:


Il s'agit d'un néologisme que l'on doit à la traductrice, Françoise Laye. Dans sa préface à la première édition (1988) de la traduction française, elle avouait certes son impuissance face aux "anomalies de langage", soulignait certes "les innombrables ruptures ou violations de syntaxe, les images abruptes, les audaces, les néologismes, les obscurités, les mélanges de style", or non seulement elle a fait un travail re-mar-quable, mais se doutait-elle de la fortune lexicographique qu'elle allait rencontrer en inventant ce mot?
Que nous dit Wikipédia à propos du terme en question?


Si on cherche les occurrences du néologisme dans gougueule, on se rend compte qu'on obtient 48 700 résultats qui certes ont énormément trait au livre de Pessoa, mais proviennent beaucoup de pages consacrées à la psychanalyse qui semble avoir goûté au mot au point de l'employer. De même, Louise Attaque en a fait le titre d'une chanson qu'on peut écouter ici. C'est dire à quel point Françoise Laye a été brillante: son invention est passée à la postérité.

Pour un traducteur, les néologismes sont toujours problématiques à plusieurs points de vue. Non que l'on soit empêché d'en créer, censuré par les éditeurs ou les correcteurs, mais souvent le traducteur n'ose pas - et de cela aussi, il faudrait parler: l'espèce de censure intérieure que beaucoup d'entre nous ont, moi le premier, cette tendance un peu lourdaude à polir le langage, à en gommer certaines aspérités alors que les écrivains de langue française peuvent se le permettre. De fait, il y a tout de même une certaine impossibilité à l'expérimentation sémantique; il y a cette traditionnelle surveillance de la langue traduite qui souffre parfois d'excès d'hypercorrections. Et bien qu'on assiste depuis une petite dizaine d'années à un desserrement du corset linguistique, il n'est tout de même pas rare d'affronter le refus éditorial.
Je me souviens de cette remarque que j'avais reçue en pleine figure à l'époque où j'avais traduit Autant en emporte la femme d'Erlend Loe. Le roman était une fantaisie situé dans le droit fil de La Salle de bain (sans S à bain) du Jean-Philippe Toussaint: tant dans la forme, dans l'histoire et dans l'écriture, l'influence de l'écrivain belge sur l'écrivain norvégien était partout présente. Une des caractéristiques stylistiques de l'écriture de Toussaint porte sur le grammaire. L'écrivain a en effet recourt à l'imparfait de narration, lequel a valeur de passé simple mais permet de restituer l'inachevé d'une action, son prolongement dans le présent, son influence récurrente sur le présent. Pour ma traduction, j'avais donc copié cet imparfait de narration. Que n'avais-je pas fait… Et je m'étais entendu dire: "Tu n'es pas Marguerite Yourcenar." Ah bon? Ah tiens, je m'en étais pas rendu compte…
Bref.

Allez, on écoute un passage de Fernando Pessoa.
D'abord en français. Puis, en-dessous une lecture en portugais avec des sous-titres en anglais.



Warm und nicht heiss

Es wird ein warmer Tag. Ob es ein heisser Tag wird, ist eine andere Frage… Der Sommer ist jedenfalls da. Also Summertime ist angesagt. Von Roy Richards. Bitte schön.

mardi 29 juin 2010

The Golden Girls in Berlin (1)

Gay Pride/CSD (a sequel)

Und der JB schreibt seinen ersten Kommentar in der deutschen Presse, sogar in seiner beliebten Zeitung, über den Artikel Jan Feddersens, wo der Journalist seine tiefe Meinung über die CSD e.V und die transgeniale CSD gibt.

Hier:

Real cool

Ein neuer Tag beginnt. Der Himmel ist flecklos blau, es wird ein warmer Tag und es wird alles gut. Die Golden Girls erobern Berlin und werden in einer Woche den Alltag bereichern. Von daher bleibt nur einerseits Einar Schleefs Gertrud ("Eure Mutter") und der gute und ungerechterweise unbekannte Zoot Simms übrig:
"Tale it real cool, never you break your mother's rule / She might hurt you und desert you, she might even throw you out"
Und einen schönen Tag, ja?!

Ach, Mist! Das Lied darf nicht eingeblendet werden. Also hier geht's los.

Für G

Und egal, ob das hier schon gespielt wurde. Man kriegt davon niiie genug.



Nein. Davon kriegt man nie genug. Also jetzt die Soulful Reggae-Version von Derrick Harriott.



Sing mit:
"I-I-I-I-I'll be there to love and comfort you
And I'll be there to cherish and care for you"

lundi 28 juin 2010

3 lignes

France, 1965 ("Moi j'ai une toute p'tite ligne de chance")



Italy, 1972 ("Manafa nessem perimbessi?")



Jamaica, 1966 ("If you got the soul")

Incopinable et ina(i)mantable

Et, se mettant à travailler, à traduire [Elle : Non, on a signé les papiers du divorce il y a deux semaines et demie.], surgit dans le cerveau, comme par une mystérieuse association d'idées, la magnifique chanson des Magnetic Fields, All My Little Words, extraite de 69 Love Songs dont on ne se lasse pas de répéter sur ce blog tatoué et fumeur que ces 69 (vraiment! il y a vraiment trois disques!) chansons d'amour doivent figurer dans toute bonne discothèque. De la trilogie, c'est le morceau qu'on a écouté le plus, indique iTunes (à ce jour 91 fois depuis son introduction dans le logiciel le 26/01/06). Voici:



N'empêche, on ne comprend pas trop l'irruption dans la pensée de cette chanson dont la tristesse est étonnamment amplifiée par un banjo pour une fois audible (parce que couplée des notes déchirantes d'un violoncelle? et non, génial lapsus (et c'est moi qui souligne): violencelle comme je viens de l'écrire). Pourquoi? Parce que, comme dans la traduction, il est question de rupture et de divorce? Parce que Stephen Merritt chante en amorce: "You are a splendid butterfly / It is your wings that make you beautiful / And I could make you fly away / But I could never make you stay", et qu'on a nous-même ouvert la journée sur un avion, sur le grondement d'un avion, sur un vol et un envol? Ou bien enfin comme la confirmation d'un aveu d'impuissance? De la même manière que Stephen Merritt a beau dire et répéter et prononcer tous ses petits mots ("It doesn't matter what I'll do / Not for all my little words") qui demeureront à jamais inefficaces, on serait en butte à une impossibilité, à un empêchement - ce qui du reste est faux.
Bref.

Tout aussi éclairante est cette phrase: "You tell me that you're unboyfriendable."
Et particulièrement ce mot: unboyfriendable. Cet adjectif nous a toujours fasciné. Cette construction sémantique qu'on traduirait volontiers par incopinable - comme un écho à la phrase tout aussi géniale de la chanson de Czerkinsky: "Pour être aimé, faut être aimable." Il faut être aimable pour être copinable. Mais incopinable a le désavantage de "désexuer" le terme originel en anglais (mais pas forcément de le désexualiser). Le second inconvénient vient aussi de la proximité sémantique avec le verbe copiner qui élude le champ amoureux, qui exclut la possibilité que deux personnes forment (ou non) un couple, qui cantonne la relation à l'amitié.

La paire amantable et inamantable fonctionnerait également si ce n'était l'euphonie que les néologismes produisent avec lamentable. Mais peut-être que justement, dans cette chanson où il est question d'un garçon qui s'en va (et hop, re-lapsus, je viens d'écrire: qui s'en veut - ouiii), qui se sépare de quelqu'un (un autre garçon?), ce peut être sinon un effet voulu, en tout cas un effet (dans tous les sens du terme). En disant: "Tu me dis que tu es inamantable", on a le sentiment d'entendre la rime "et c'est lamentable/que tu es lamentable".
Quand, pour s'amuser, on va vérifier dans gougueule si par hasard nos néologismes n'auraient pas déjà été inventés par un esprit badin, on constate d'abord que la première paire n'existe pas. Or, pour la seconde, si inamantable n'est pas non plus présent, on trouve toutefois, à notre grand ravissement, une définition pour amantable, sur ce site belge:


Ça alors!
Ça c'est une perle!
On va voir ailleurs, dans tous nos dictionnaires, mais nulle part le mot ne revient. Et même si cette définition ne correspond pas au sens de notre néologisme mais dans le même temps confirme la proximité sonore malheureuse de ce choix lexicographique, cette coïncidence nous laisse tout de même pantois.

Puis on se dit qu'on pourrait aussi jouer sur un mot existant et proposer les adjectifs aimantable/inaimantable. Les occurrences dans gougueule pour le premier terme sont nombreuses puisqu'elles donnent 5740 résultats, alors qu'on est face à un hapax (un mot qui ne revient qu'une fois dans l'usage, un mot employé par un seul écrivain/une seule personne) pour le second. En disant "Tu me dis que tu n'es pas aimantable" (plutôt sous cette forme que sous la seconde, avec son préfixe négatif), on offre une réalité sémantique tout à fait parlante, du moins à nos oreilles. On perçoit un double sens dans le signifant de ce terme (rappel: signifant, chez Ferdinand de Saussure: la réalité concrète que la sonorité du mot provoque dans le cerveau, autrement dit: son image phonique; signifié: le sens réel de ce même mot, le concept concret auquel ce mot renvoie). Et ce double sens décline à la fois le fait que, primo, personne ne peut aimer le locuteur, qu'on ne peut devenir son amant, que ce locuteur ne se laisse pas aimer; et, secundo, que le locuteur ne se laisse pas aimanter, qu'on ne peut "s'accoupler" avec lui, former une union avec lui, devenir "un" avec lui.

Si bien, pour résumé, qu'on aurait les propositions suivantes - et il est assez surprenant de constater leur efficience linguistique (tant dans le signifiant que le signifié) en fonction de l'emploi ou non du suffixe in-:
Tu me dis que tu es incopinable
Tu me dis que tu es inamantable
Tu me dis que tu n'es pas aimantable

Allez, comme un énième écho, un écho celui-là à cette exploration autant qu'introspection sémantique autant que musicale, on se quitte sur cette magnifique chanson de Neil Hannon, If I Were You (I'd Be Through With Me), extraite du très court (7 chansons seulement) A Short Album About Love, de 1997, qui devrait lui aussi figurer dans toute bonne discothèque (et c'est sans doute l'album de Neil Hannon/Divine Comedy dont il n'y a absolument rien à jeter). Une chanson où quelqu'un intime quelqu'un d'autre à le le/la quitter.



Juste une dernière remarque sur cette chanson.
Comme on l'a vu plus haut avec Stephen Merritt, puisque c'est lui qui chante, l'auditeur/trice suppose que c'est lui qui parle, que c'est lui qui s'adresse à quelqu'un. Puisque ce quelqu'un se dit unboyfriendable, on conclut évidemment que ce quelqu'un est un garçon/un homme et que donc Stephen Merritt est amoureux de ce garçon, qu'il s'agit donc, en fin de compte, d'une chanson sur un amour homosexuel, ou plutôt sur l'amour d'un homme pour un autre homme (correction importante puisqu'on n'a pas besoin d'être homosexuel pour être amoureux d'un autre homme - bref).
Dans la chanson de Neil Hannon, c'est pareil. Puisque c'est lui chante, on conclut que c'est lui qui parle, que c'est de lui qu'il s'agit. Que c'est lui qui dit: "Si j'étais toi, je me quitterais." De la même manière qu'on sait la préférence de Stephen Merritt pour les hommes, on sait la préférence de Neil Hannon pour les femmes, donc par mimétisme (sans nul doute stupide), on se dit qu'il déclame cette chanson à une femme.
Bon.
Or, quand on avait redécouvert la chanson en question, en 2007, on avait été stupéfait d'entendre cette phrase: "Don't you ever, in your dreams / Take a lover and make her scream?" Je répète, en soulignant: "Take a lover and make her scream?"
Pardon?!
Her?!?!?!?!
Ça veut dire quoi?
Que la femme en question a trompé l'homme qui chante avec une autre femme?
Et si en fin de compte ce n'est pas du tout l'homme qui chantait, pas du tout Neil Hannon, mais bel et bien une femme qui chantait? Et si Neil Hannon chantait la chanson que lui a chantée la femme avec qui il était? Qu'il s'est réapproprié la chanson, en d'autres termes. Dès lors, ce n'est plus elle qui doit le quitter, mais elle qui l'exhorte à la quitter.
Ultime proposition: La chanson est chantée par un homme, à un autre homme, qui trompe et quitte le premier avec une femme.

Quoi qu'il en soit, quelle que soit la lecture qu'on choisisse, ce sémantisme nous confirme l'importance de ma remarque (= on n'a pas besoin d'être homosexuel pour être amoureux d'un autre homme) et la justesse de la réflexion de la théorie queer qui invite à abandonner le corset de la taxinomie, au vu de la fluctuation de la sexualité (au fil des personnes, des âges, etc.) et du genre.

Noise

On est réveillé par le bruit d'un avion qui passe bien bas - et du coup on pense forcément à Leaving on a Jet Plane. Conséquemment, on écoute la version de David Isaacs dont on avait oublié qu'elle était rythmée par des trilles de flûte traversière, ça alors…
Man wird von dem Lärm eins Flugzeugs aufgewacht, der zu unten fliegt - und man muss dann natürlich an Leaving on a Jet Plane denken. Also hört man Davis Isaacs' Version und man hatte völlig vergessen, dass drin eine Querflöte zu hören ist, mann…



Aber nun geht alles schief. Geräusche sind überall und viel zu stark. Vor 10 Minuten ein brüllender Lastwagen, jetzt ein Kran, und dann die Autos. Und man hat das Gefühl, man sei in einem Lied von My Bloody Valentine, wenn die Gitarren überspielt und gesampelt sind. To Here Knows When zum Beispiel. My Bloody Valentine hat man sowieso immmmer gemocht. War man sauer oder traurig, hat man My Bloody Valentine gehört, wie ein Auslaster für die Wut. Das hat immer funktioniert.
Et maintenant tout va de travers. Les bruits sont partout et tous amplifiés. Il y a dix minutes résonnait le grondement d'un camion et c'est maintenant une grue, et puis toutes ces voitures dont le niveau sonore semble être poussé au maximum. Et on a la sensation d'être dans une chanson de My Bloody Vlaentine, quand les guitares sont non seulement saturées mais samplées pour mieux en accentuer la férocité. To Here Knows When, par exemple. Quand on est en colère ou trop triste, on écoute toujours My Bloody Valentine, qui fonctionne comme un exutoire à la hargne. Ça a toujours fonctionné.

dimanche 27 juin 2010

sleep - dream

Before we go to sleep, we look for the last time at the sky:

© icke

Before we go to sleep, we listen for the last time to a song:



And now we can (try to) sleep:



And then we can ((not) want to) dream:

WM/Mondial: Maradona

Argentinien vs. Mexiko.
Bier- und Pinkel- und Blogzeit.
Es erinnert uns an diesen Grafik, die vor einer Woche in der TAZ herausgegeben wurde:

© icke

Was uns in der 2. Halbzeit erwartet:
Rosetti schmeisst Maradona vom Rasen heraus und weg in die Garderobe.

WM/Mondial: Deutschland vs England (a sequel)

Ich sage nur: Manuel Neuer…
(und seine Oberschenkeln)

WM/Mondial: Deutschland vs England (art/Kunst)

Il est 16 heures et le match Allemagne/Angleterre commence. Bien évidemment, on le regarde avec ses copains.
Es ist 16 Uhr und das Spiel zwischen Deutschland und England fängt an. Selbstverständlich schaut man es an, mit seinen Kumpeln.

Und neulich, beim Zeitungenaufräumen, stoss man wieder auf einen Artikel in der TAZ über eine in Januar 2010 organisierte Ausstellung in der Hamburger Bahnhof, die man leider nicht gesehen hat. Der Künstler heisst Paul Pfeiffer und das Kunstwerk The Saints, eine Video- und Soundinstallation über das 1966 WM-Spiel zwischen… Deutschland und England.
Et récemment, lors d'un énième rangement de journaux,on est retombésur un article paru dans la TAZ sur une exposition organisée en janvier 2010, à la Hamburger Bahnhof, qu'on regrette aujourd'hui de ne pas avoir vue. L'artiste s'appelle Paul Pfeiffer et l'œuvre d'art s'intitule The Saints, une installation sonore et vidéo sur le match de la Coupe du Monde 1966 opposant… l'Angleterre à l'Allemagne.

On regarde une vidéo de cette installation:
Man guckt sich ein Video dieser Installation an:




On recopie l'explication de l'œuvre par la galerie Saatchi qui l'a exposé à l'automne dernier, dans un texte de Bill Roberts.
Hierunten ist die Erklärung des Kunstwerks geklebt, d.h.: der Artikel von Bill Roberts für die Ausstellung in der Saatchi-Gallerie, die The Saints auch gezeigt hat:
In a large empty building nestled close to the new Wembley Stadium, Paul Pfeiffer's new sound and video installation, 'The Saints', sees the New York-based artist tackling - if you'll excuse the pun - the national British obsession: football. Pfeiffer has built a considerable reputation for his photographic and video works that appropriate iconic imagery from the worlds of pop music and sport, though up to now it has primarily been American obsessions that have caught his attention. In many works, he digitally isolates a single individual from a larger group, leaving the backdrop intact, seemingly to enhance their larger-than-life presence. For instance, in the photo series, 'The Four Horsemen of the Apocalypse', the artist removes all but one of the players from a basketball court, leaving the crowd looking on in awe as the remaining star jumps up for a slam-dunk.
In Wembley, viewers enter the building to the sound of crowds chanting numerous anthems, from Rule Britannia and When the Saints Go Marching In, to Deutschland über Alles. The soundtrack, emanating from a large number of speakers, is lifted from the 1966 World Cup final between West Germany and England, the most famous sporting event ever to be held in Britain. Pfeiffer, who was born in Honolulu and grew up in the Philippines, has filmed a large gathering of sports fans in Manila as they cheer and chant through footage of the England-Germany match, and this will be shown alongside footage of the original event itself. On one screen, Pfeiffer repeats his device of filtering all but one of the athletes from the pitch, and the viewer is left following a single lonely individual as he jogs and sprints, apparently aimlessly, from one corner of the pitch to the other. Running until the end of October, 'The Saints', a project developed with the help of Artangel, will entice football fans and non-football fans alike, both for its celebration of the beautiful game and simultaneous probing of spectacle culture.

WM/Mondial: Deutschland vs England (tattoo)

In eine Stunde spielt England gegen Deutschland.
Dans une heure commence la rencontre entre l'Angleterre et l'Allemagne.

Letzendlich ist es auch eine Tätowierungskampf.
En fin de compte, c'est aussi un match de tatouages.

Wer gewinnt?
Qui va gagner?

Wayne Rooney für England/pour l'Angleterre?

© imago

Oder/ou Marcel Janssen für Deutschland/pour l'Allemagne?

© Oliver Hardt


Mehr Bilder hier und dort.
Plus d'images ici et .

Échec cognitif

On se réveille avec dans la tête Baby Don't You Do It des Clarendonians qu'on ne trouve pas sur toitube mais qu'on trouve en revanche listé dans la compilation faite maison et intitulée Abschiedslieder, donc chansons de rupture, et dont il avait déjà été question ce jour-là. On s'étonne que les accords de clarinette résonnent sans… raison, puisqu'on ne voit décidément pas pourquoi ils s'imposent - même si, à l'écoute à la réécoute, on comprend mieux: de fait, les "musiques du matin" (ainsi qu'on les appelle) ne sont qu'un prolongement éveillé et conscient de l'activité onirique, endormie et inconsciente. Et puis on réentend cette phrase qui ne cesse chaque fois de nous étonner: "You took my pride and you made me cry, darling, but I still love you" - et là encore, bien que dans l'instant elle nous dépasse (on a un peu de mal à associer la rupture et la trahison amoureuse avec une atteinte à la fierté de la personne trompée et/ou quittée), on a au final pas trop de mal à se représenter que certaines personnes aient ce ressenti.

Bref.
La compilation continue de dérouler ses chansons de rupture et, deux morceaux après, commence les accords de mod reggae de I'm Ashamed de Little Willie, sorti chez Blue Beat en 1963. De la fierté on passe donc à la honte, et on s'étonne à présent de cette pensée immédiate qui nous fait croire un instant que, dans le domaine de l'amour, ces deux sentiments sont sinon identiques, en tout cas les deux faces d'une même pièce. En est-il vraiment ainsi? La question nous plonge des abîmes de perplexité et on se dit qu'on n'a pas envie d'être envahi par le doute de si bon matin.
On revient à la chanson.
On l'écoute d'abord.



La chanson raconte donc l'histoire d'un homme plaqué par une fille et qui a honte de dire la vérité à ses amis. Il a eu beau aller frapper à la porte de la fille et l'implorer de ne pas rompre, sa décision à elle était définitive: c'est terminé. Elle dit: "Please, get off of my side." Et lui, il dit quoi? Il dit et il répète: "I'm gonna fuck off". Et cette répétition de "I'm gonna fuck off" fait écho à l'autre phrase liminaire elle aussi répétée: "I'm ashamed". Et on a alors l'insidieuse (?) impression de retomber sur ses pieds, de retomber sur cette pseudo-dichotomie entre la fierté et la honte, de ne pas pouvoir en sortir, d'être face à une interrogation poisseuse qui nous colle à la peau et ne se desquamera pas tant qu'on n'aura pas étudié, examiné à fond sa nature.
Comme on a souvent des airs de Saint-Thomas de la lexicographie et que, donc, on ne croit que les sens qu'on voit, on va tout de même vérifier et, pas loupé, honte est indiqué comme antonyme possible de fierté:



Et ensuite?
Ensuite on se dit qu'il y a une connexion sémantique qui ne se fait décidément pas du point de vue cérébral. Comme si on se faisait expliquer un mot qu'on ne comprenait toujours pas au bout d'une demi-heure. Quand on pense à cette antonymie entre honte et fierté, surgit une espèce d'espace blanc dans le champ cérébral, un espace blanc ou une feuille blanche ou les deux à la fois.

Après avoir écouté douze fois de suite I'm Ashamed, pour comprendre les tenants des aboutissants et pour au final constater qu'on n'est pas mieux loti qu'au début, on se réconforte en pensant à la fin de la chanson qui répond au "I'm gonna fuck off" par: "And it won't be wrong any more". Voilà. Et c'est là-dessus qu'on va se quitter: sur un constat d'échec cognitif mais sur une promesse de mieux-être affectif.

samedi 26 juin 2010

Alles wird gut

Und man war mit den linken schwullesbischtranstralala Chaoten auf der Kreuzberger CSD, bzw. Transgenialer CSD, und am Anfang war es schön und am Ende sah man entsetzt die Schönebergisierung der Veranstaltung. Bah!

Während man auf sein Fressen wartete sah man das:

© icke

Immerhin, dachte man.

Voll lauter Optimismus (oh, das reimt mit Kartoffelmus) wacht man von einem Pfeffischlaf auf, geht schnell unter der Haube um seine Dauerwelle zu reparieren, isst a bisserl französische Gedärmewurst und denkt: was nun?
Tja…
Aja: alles wird gut und man ist zum Nighter verabredet. Toll!
Was hören?
Tja…
Hm. Das nich. Das ooch nich. Das auf jeeeden Fall nich.
Alles wird gut. Optimismus. Kartoffelmus.
Ja, genau. Ob la di Ob la da. Man hat immer dieses Lied gehasst. Sobald man es hört, muss man an die Bälle seiner Jugend mit Marcel und seinem Orchester denken… Oje… Aber dann gibt's ja die Version von Joyce Bond, von 1968. Besser wird es. Die Bond Girl singt schön, die Orgel ist nicht schlecht und… eigentlich… ja, es funktioniert. Man singt sogar mit: "Life goes on!" Jaaa! Man ist schon voll Kartoffelmus im Gehirn!



Och nee, letzendlich geht es gar nicht. Das Ende des Liedes ist wirklich doof! Nach dem Motto: "Ach, mann ey… Ich weiss wirklich nich, wie ich dieses blödes kartoffelmussisch Lied beenden muss! Wie soll ich das schaffen??? Ach ja! Einfach "Hey!" singen und dann fertsich!"

"What is in her mind?"

Coïncidences (comme on les aime) du travail et collision entre la traduction et la musique, je traduis:
Tu es rayonnante, Karoline, lui dis-je. Merci Abnash, me répond-elle. Ce n’est pas la robe que tu avais lors du déjeuner de Noël? demandé-je. Elle fait signe que non, arbore ce sourire rayonnant dont elle a le secret, elle rayonne. Karoline rayonne, tout chez elle rayonne: ses yeux, sa bouche, ses joues, ses bras, des mains, ses seins, ses cheveux. Mais tu as raison, répond-elle, elle aussi était rouge. Celle-ci me plaît encore davantage, réponds-je. Et voilà, à présent, Karoline me sourit et elle ne sourit qu’à moi, sans relâche.

Tandis que iTunes diffuse ce morceau que je ne connaissais pas des Folkes Brothers, de 1961, produit par Prince Buster et orchestré par Count Ossie, intitulé… Oh Carolina:



Dans le roman de Trude Marstein, l'énigme repose justement sur cette femme, Karoline. Karoline vient de fêter ses cinquante ans, a organisé une grande fête. Puis elle a disparu de son anniversaire. Où est Karoline? Le lecteur sait: Karoline a pris un train et a planté tout le monde. Visiblement, Karoline en ras le bol des gens, ras le bol de tous ces hypocrites.
Et, en vertu du pacte littéraire qui lie le narrateur et/ou écrivain à son lecteur, deux règles prévalent - en principe:
• le narrateur/écrivain veut le bien du lecteur
• le narrateur/écrivain ne ment pas à son lecteur
En principe, car dans ce roman kaléidoscopique et polyphonique (où chaque personnage devient narrateur le temps d'un chapitre), les points de vue sur ladite Karoline changent.

Ainsi, hier (hier pour moi, le traducteur), Viktor affirmait:
Karoline exalte les gens. Tout le monde fait un effort supplémentaire en sa présence : les conversations sont plus amusantes, plus intelligentes, plus réfléchies, cela ne fait aucun doute.
Avant-hier (toujours pour moi), sa belle-mère, Bjørg, disait d'elle:
Je ne connais pas Karoline. Au bout de vingt ans je ne connais toujours pas Karoline. (…) Tous les hommes adorent Karoline et s’épuisent à ne pas le montrer. Toutes les femmes détestent Karoline et s’épuisent à elles aussi ne pas le montrer.
Et la vieille encore (toujours pour moi), Julia avait cette discussion avec Sverre, le mari de Bjørg, à propos de de Karoline (Egil étant le mari de Karoline):
Je poursuis: Et je n’affirmerais pas non plus que j’apprécie énormément Karoline. Je ne crois pas que ce soit quelqu’un de bien pour Egil. Julia secoue lentement la tête: Pour personne elle n’est quelqu’un de bien. (…) Elle a bousillé mon frère, dit-elle alors, ce à quoi je réponds: Non, nous n’allons pas non plus rendre Karoline responsable de tous les maux de la terre, Julia… Karoline est aussi une femme merveilleuse. Qui a beaucoup de bons côtés, qui a beaucoup de bonnes choses en elle. Nous n’avons pas que des défauts et de mauvaises intentions, Julia… Elle: Certes, mais tout le monde ne passe son temps comme elle à détruire les autres! (…) Moi: Et puis, rendre Karoline responsable des inquiétudes de Peter n’est pas juste non plus. Elle n’a pas autant de pouvoir sur les gens que cela… Julia: Si, Sverre. Si, elle l’a ce pouvoir.

Alors qui est Karoline? Une garce? Une manipulatrice? Une femme merveilleuse?  Une femme qui révèle ce que les gens ont de mieux (ou de pire) en eux? Quelle est, au fond, l'influence d'un individu sur un autre? Est-ce qu'on change radicalement au contact d'une autre personne? Est-ce qu'on connaît jamais quelqu'un tout à fait?
La littérature s'est toujours passionnée pour ce motif: le regard de l'autre sur un individu, les intermittences de ce regard et des opinions, voire: la connaissance profonde d'un individu. Lawrence Durell, avec son Quator d'Alexandrie, proposait quatre regards sur un même événement et nous montrait que la vérité n'est jamais au rendez-vous. Antje Rávic Strubel, dans son Tupolew 164, relevait quant à elle ce défi narratif de présenter un personnage principal profondément ambigu, Katja Siems, en conservant jusqu'au bout un mystère total sur la véritable nature et identité de cette femme: personne ne saura jamais de quoi elle est faite.
Qui n'a jamais voulu entrer dans la tête des gens? Dans leur cerveau? Pour savoir ce et à quoi ils pensent vraiment? C'est notamment ce que donne à voir Trude Marstein dans son Faire le bien.

Et du coup, on pense forcément à la chanson de Lou Reed, Caroline Says (Part II), extraite de l'album Berlin, (hé hé… quelle énième belle coïncidence), de 1973, où il chante: "Caroline says / as she makes up her eyes / You ought to learn more about yourself / think more than just I (…) all of her friends (…) laugh and ask her / What is in her mind / what is in her mind"
Allez, on écoute Lou Reed:

In the pink

On se demande, en se réveillant, ce qu'on va mettre (puisque aujourd'hui comme hier la musique du matin qui résonne dans la tête est Johnny Too Bad - et, très franchement, on n'a pas pas trop envie d'entonner "You're gonna run to the rock for rescue / There will be no rock"). Du coup on fouille iTunes et on se dit: oui. Prince Buster. On ne met pas assez de morceaux de Prince Buster sur ce blog tatoué et fumeur alors que c'est un des plus grands. Un peu de justice dans ce monde de (sales) brutes ne peut faire que du bien (la bonne blague d'hier, entendue hier soir aux informations: Le G8 promet de lutter contre la mortalité dans les pays pauvres! hö hö hö).
Mais quel morceau de Prince Buster choisir? Pff… Tous en fait. On adore Jamaica Ska qui propulse quiconque sur la piste aux étoiles et le/la fait danser et sourire et hurler à en devenir dingo (et, étonnamment, surgit dans le cerveau l'image de Ralph en train de mettre le morceau et se trémousser derrière ses platines, avec son irrésistible sourire jusqu'aux oreilles). On aime bien aussi l'instrumental Forrester's Hall qui embellit toute journée déjà assombrie. Justement. Comme on est aujourd'hui samedi, qu'on va aller défiler avec les pédésgouinestrans-machintruc d'extrême-gauche à la Transgenialer CSD (= Gay Pride transgéniale), que ce soir on ira avec G et N et F et A et P et L et les autres au nighter de la Rigaer Strasse, on va écouter Enjoy Yourself pour ces deux raisons justement puisque les paroles disent, primo: "Enjoy yourself while you're still in the pink", secundo: "The years go by as quickly as you wink / Enjoy yourself, enjoy yourself, it's later than you think".
Allez, enjoy, donc, et une bonne journée, hein!

vendredi 25 juin 2010

"Your burning flesh"

Je traduis - mais d'abord, le contexte:
Fête d'anniversaire. Deux couples se retrouvent: Viktor et Lene d'une part, Isa et Erik d'autre part. Erik a été victime d'un accident de la voie publique.
Isa relâche son étreinte et me donne une accolade. Son parfum est tellement fort qu’il donnerait presque mal au crâne. Bonjour Viktor, me dit-elle. Je suis vraiment contente de vous voir tous les deux! Je me tourne vers Erik, serre la main qu’il me tend: Erik…! Bonjour Viktor, répond-il. C’est…, dis-je en écartant les bras. C’est… incroyable de te voir là devant moi comme si rien ne s’était passé! T’as dû déguster, dis donc… Erik: La rééducation a été très longue… Oh là là ce qu’il parle lentement! Et en détachant chaque syllabe en plus. Même moi je trouve que c’est long, ajoute-t-il, toujours aussi lentement. Mais ça ne fait que deux ou trois mois que ça a eu lieu, non? demande Lene. Plus de quatre, corrige Isa. Le premier mois a été du pipi du chat… Et à ces mots elle rit. Je l’imite aussitôt, d’un rire plus contenu, mais quand je regarde Erik je vois qu’il ne rit pas du tout. Lene non plus. Avant, Erik rigolait pour un rien. Isa: J’avoue que je n’y étais pas du tout du tout préparée… Moi: Personne ne l’est… Isa: Quand ils m’ont appelée de l’hôpital, j’ai répondu: «Quoi? Non, c’est pas possible!» Ensuite ils m’ont demandé de sauter dans le premier taxi et de venir aux urgences. Et là j’ai répondu: «Mais je ne peux pas, voyons… j’ai trois pains qui cuisent dans le four!» Elle s’esclaffe. Et quand elle rit comme ça, on voit ses molaires. Elle est belle et vulgaire comme une enfant. Moi: Punaise! Isa: Ç’a été une période très dure. Ç’a été très pénible. Erik me regarde. Tu en as gardé des souvenirs? je lui demande. Oui… non… un peu… c’est loin…, répond-il. Isa embraye: Quand j’ai vu Erik sur son lit d’hôpital, avec tous ces conduits et ces tuyaux, dans le coma, je me suis dit: non, ça ne m’arrive pas à moi! Et elle s’esclaffe encore. Moi: Punaise! Erik bouge d’un pied sur l’autre, le regard rivé sur ses chaussures. Isa: Disons que ça donne une autre vision de la vie. Moi: Oui, peut-être qu’on pourrait tous en tirer quelque chose de bien. Quelque chose qui nous donne une autre perspective sur ce qui est important dans cette vie, ce qui a de la valeur. Erik: Non, Viktor. Ce que j’ai traversé, je ne le souhaite à personne, même à mon pire ennemi.
© Gjøre godt, Trude Marstein, Gyldendal Forlag, 2006
© Faire le bien, traduit par Jean-Baptiste Coursaud, éditions Stock, 2010

Fatalement (sic!), on pense à la chanson de The Normal, Warm Leatherette, de 1979:




Plus tard, mais plus tôt dans le roman, Viktor, désormais narrateur de son chapitre, a le monologue intérieur suivant:
Et voilà, Isa est rentrée. Mais qu’est-ce que je peux dire? Oui, qu’est-ce que je peux dire? Je n’ai rien à dire. Moi qui suis rentré tôt de la fête. Moi qui ne supporte pas plus de deux verres d’alcool désormais sans que je sois aussitôt anxieux et que j’aie envie d’être seul. Je n’ai rien à dire quand la reine de la fête rentre au petit matin. Si tu avais trouvé la mort…, a dit Isa avant le dîner. Et même si elle s’adressait davantage à Viktor qu’à moi, c’est moi qu’elle regardait. C’est encore trop proche, je n’aurais pas dû en parler à la fête. J’ai fait un signe de tête. La vie est plus fragile qu’on ne le croit, a corrigé Viktor. Je n’étais pas d’accord mais je n’ai rien dit. Puisque je trouve la vie nettement moins fragile que je ne le croyais. La vie est coriace, ardue, dure comme de la couenne. La vie est un calvaire, un crève-cœur. J’ai regardé ailleurs, essayé de penser à autre chose. J’aurais pu me mettre à pleurer, sauf que dès lors je n’aurais pas pu m’arrêter. Je ne sais pas ce que j’aurais fait, a répondu Isa. Et maintenant Isa est à la salle de bains. J’ai le cerveau bousillé. Ils ont beau me dire ce qu’ils veulent, je le sais, je le sens. Un truc ou un machin s’est démantibulé, là-haut. Je ne suis plus le même. Je suis imprévisible désormais. Je ne sais plus ce que je vais ressentir ou penser dans la seconde qui suit. Il n’y a rien de pire que ça: devoir vivre en étant imprévisible. Je passe la moitié de mes nuits sans pouvoir fermer l’œil. On m’a conseillé d’être prudent, de ne pas trop me concentrer. Raté: à mon corps défendant, je pense à Isa, aux enfants, à la maison, au travail, à l’avenir, à l’aridité, à la stérilité. Je pense à moi, à l’homme que je suis, à l’homme que j’étais. Je revis l’accident. À chaque fois. Et à chaque fois j’essaie de l’empêcher. Je prends un autre chemin, je pédale dans un autre sens, j’enlève la neige fondue de la chaussée, je fais attention à ne pas perdre l’équilibre, je me déporte au tout dernier moment, je me jette du vélo mais le choc se produit : quoi que je fasse, il y a ce putain de choc qui se produit, cette douleur hallucinante qui me vrille le corps et la seconde d’après je tombe dans les pommes. Isa se faufile dans la chambre et se love sous la couette en faisant le moins de bruit possible. Tous les jours elle me toise, me jauge, histoire de vérifier si je suis toujours moi-même, si je fais des progrès, si elle reste avec moi ou si elle va me plaquer. Elle se demande quand je recommencerai à lui faire l’amour. Je me tourne délicatement vers elle. Ses cheveux noirs s’étalent sur l’oreiller, jusque sur mon côté. Elle a des mèches si épaisses et si brillantes qu’on les prendrait pour des cheveux artificiels, pour la natte du cheval à bascule de Viktoria. Elle tourne la tête vers moi, me regarde, son visage baigne dans la lumière du jour, elle prend une inspiration pour dire quelque chose, ses yeux brillent. Mais elle ravale ses paroles. Elle ferme les paupières, attend le sommeil. Jamais plus je ne serai en état de la pénétrer. Plus le temps passe et plus ça me paraît carrément impossible: être couché sur elle, mon visage contre le sien. L’angoisse me paralyse dès que j’y pense, à tel point que je dois changer de côté histoire de penser à autre chose. À quoi?
© ibidem


Du coup on poursuit sur Warm Leatherette, chanson inspirée par le roman de James G. Ballard, Crash!, de 1973, qui a par ailleurs été adapté à l'écran par David Cronenberg en 1996, avec l'inoubliable Rosanna Arquette dans le rôle de Gabrielle:

Salle de Bal(lhaus) (7)

Frank Giering († RIP)

Frank Giering ist tot. († RIP) Man erfuhr es gestern in einem sehr schönen Nachruf im Spiegel, hier. In unserem Gedächtnis verbleibt er Peter, in Michael Hanekes Funny Games. Die Nachricht ist unheimlich traurig und lässt uns sprachlos sowie fassungslos.

jeudi 24 juin 2010

WM/Mondial: Un fiammifero

2 zu 0 für die Slowakei gegen die Tortellinis und noch 15 Minuten Spiel. Geil geil geil! Die Squadra braucht sicher ein bisschen nationale Musik. Bitte schön mit Gli Innominati und Prendi un fiammifero (1967). Und dann cann Cannavaro zurück nach Dubai Cancan tanzen…

2 à 0 pour la Slovaquie contre les Ritals et encore 15 minutes de jeu. Génial génial génial! La squadra a besoin d'un peu de musique nationale. Leurs désirs sont des ordres: voici donc Gli Innominati avec Prendi un fiammifero (1967). Et ensuite Cannavaro pourra retourner faire du cannavas à Dubaï…



Hö hö hö!
Comme le commentateur allemand vient de le dire:
Wie der deutsche Kommentator es gerade sagte:
"Italien ist out of Africa"

La barbe!

Juste avant d'aller se sustenter en un mot, on traduit cette phrase fastoche qui ne pose aucune question:
Il a des cheveux blonds, une barbe, des lunettes de soleil.

Mais en lisant le mot barbe, on songe à la locution: la barbe!
Elle vient d'où?
Le Robert des expressions et locutions nous indique:
BARBE n.f.
Vieille barbe "vieillard ennuyeux". L'ancienne locution jeune barbe signifiait "jeune homme sans expérience". Après avoir été longtemps associé à la sagesse, le mot barbe est lié en français moderne à l'idée d'ennui (cf. les emplois lexicalisés: la barbe! barber, barbifier, ça me rase, etc.). Barbon, qui exprime la même idée, est archaïque, et vieille barbe ne s'emploie plus guère pour désigner un personnage concret, mais d'une manière abstraite, un professeur, un auteur ennuyeux, etc.

D'accord.
Autre chose? Non. Sinon que ce sémantisme, nous précise le Robert historique de la langue française, est relativement récent - ce qui nous surprend au demeurant:
◊ La notion d'ennui, réalisée dans les expressions familières faire la barbe (1866) et, elliptiquement, la barbe (1881), procède probablement de rébarbatif, employé avec un sens analogue dès le XVIIe siècle (cf. raser et ci-dessous barber). Cette valeur, aussi réalisée exclamativement (la barbe!) a vieilli.
BARBER v. tr. apparaît relativement tard en moyen français (1397) au sens propre de "faire la barbe", sorti d'usage au profit de raser (XVIIIe siècle) ◊ Le sens figuré "ennuyer" (1882), d'abord argotique puis familier, procède par synonymie de l'emploi familier de raser sous l'influence du sens de rébarbatif.

Aussi consciencieux que curieux, on va voir dans le même dictionnaire à rébarbatif:
RÉBARBATIF, IVE adj. est en général considéré comme dérivé (v. 1360), avec un suffixe savant, de l'ancien français (se) rebarber "faire face à l'ennemi, regimber" (v. 1250), proprement "faire face barbe contre barbe" (…) ◊ Le mot caractérise d'abord une personne qui rebute par un aspect rude et comme hérissé, concurrençant et supplantant l'ancien rebarbe, dérivé de rebarber; il s'est dit au XVIe s. d'un peuple non civilisé. ◊ Au siècle suivant, il a développé le sens d'"aride et ennuyeux" (1670, Molière), resté usuel, à propos des personnes, des actes, des écrits, des œuvres.

Ce que les dictionnaires en revanche n'expliquent pas, c'est l'instant de collusion entre le sémantisme et la modernité.
Autrement dit: pourquoi, à un moment (qui plus est tardif) de l'histoire, brusquement, le langage considère tel sens imagé comme caractéristique d'une réalité? Les vieux barbons sont-ils, vers 1880, si ennuyeux, si dépassés, si éloignés du concret qu'ils en deviennent plus que jamais synonymes et images de l'ennui le plus ultime?

Un mot, supra, a néanmoins attiré notre attention: argotique.
Et si on allait vérifier dans nos dictionnaires d'argot?
Bonne idée.
Et là, dans le Larousse Argot & français populaire, qu'est-ce qu'on trouve?
Cette locution:
2. Se mettre une fausse barbe, pratiquer le cunnilinctus.
Pardon?
Tiens tiens… Intéressant. D'autant plus qu'aucun des Robert n'indique ces sémantismes, alors qu'on ne peut pas leur reprocher d'être des mère/père la pudeur…
(…)
… Oh oui, tiens, pourquoi on ne dirait pas Roberte au lieu de Robert? Pourquoi on n'adapterait pas à la lexicographie et à la linguistique le principe du projet artistique d'Agnès Thurnauer qui a détourné (notamment) le nom des artistes masculins en artistes féminins. Joseph Beuys est ainsi devenu Joséphine Beuys, Le Corbusier La Corbusier, etc - et dénoncer notamment l'hyperprésence des artistes masculins aux dépens des artistes féminins. On en voit une illustration ci-dessous:

© Agnès Thurnauer

Nous, on dirait ainsi:
J'ai consulté ma Roberte où Aline Rey précise que l'analyse linguistique de Pierrette Guiraud et de Claudine Hagège sont complètement erronées mais que, en revanche, le point de vue de Fernande de Saussure est tout à fait intéressant.

Pas mal, pas mal…

Mais revenons à nos histoires de barbe et de cunnilingus. D'ailleurs pourquoi les rédacteurs (eh oui, encore des -teurs et pas des -trices: Jean-Paul C., Jean-Pierre M. et Christian L.) parlent de cunnilinctus? Je croyais qu'on disait cunnilingus? Mais bon, ce que j'en sais moi, hein…
Que dit Pierrette Merle dans son Nouveau dictionnaire de la langue verte?
Se mettre une (fausse) barbe: pratiquer le cunnilingus [sic! - c'est moi, JB, qui souligne]. Remarque: l'épilation féminine étant devenue, de nos jours, quasiment une règle de bonne conduite, l'expression n'a plus, depuis une bonne dizaine d'années, de raison d'être. Aussi s'emploie-t-elle moins qu'auparavant en début de XXIe siècle. Mouiller la barbe: c'était, naguère, l'expression consacrée pour évoquer, chez une femme, le fait de satisfaire un besoin pressant.
Et, repensant à Agnès Thurnauer, liant son projet avec ce sémantisme de barbe qu'on ignorait, on pense forcément au tableau désormais hyper célèbre de Marcelle Duchamp, de 1919, L.H.O.O.Q., où l'artiste avait plaqué une moustache à Mona Lisa, ainsi qu'on le voit ci-dessous:

© Marcel Duchamp

Est-ce que Marcelle avait pensé à l'expression ci-dessous en composant son tableau? D'un pur point de vue linguistique, c'est d'autant plus possible que le mot barbe, indique le Roberte, renvoie à l'origine "aux 'poils du menton (et des joues de l'homme (incluant parfois la moustache)'"; et est étymologiquement identique au lituanien barzdá, au vieux slave brada, à l'ancien haut allemand Bart (en allemand moderne Bart signifie certes barbe mais moustache se dit dans sa composition Schnurrbart) et j'ajouterai enfin que, en scandinave, bart signifie bel et bien moustache. Le pastiche/postiche (hö!) de Marcelle s'intitulant L.H.O.O.Q., on peut doublement se demander s'il n'y a pas un lien entre le détournement artistique, l'image représentée et le sémantisme au final sexuel qui lie les poils du visage à ceux du sexe féminin? Bon, tout ceci n'est qu'une supposition. Mais on est sûr que M. saurait nous renseigner du pur point de vue de l'histoire de l'art. N'est-ce pas, M.?

On retourne une toute dernière fois à l'explication de Pierrette Merle car elle vaut quand même son pesant de cacahuètes. Qu'est-ce qu'il dit, Pierrette?
Ah oui. On re-cite (et on souligne):
Remarque: l'épilation féminine étant devenue, de nos jours, quasiment une règle de bonne conduite, l'expression n'a plus, depuis une bonne dizaine d'années, de raison d'être.
C'est pas un soupçon machiste, ça, quand même Pierrette?

Oh, la barbe!

Parce que justement, et c'est en fait uniquement à cause d'elles qu'on a produit cette longue réfléxion: c'est de La Barbe qu'on voulait parler. La Barbe, ce collectif féminin et féministe, ces empêcheuses de penser et faire mâlement en rond, ces trublionnes qui s'immiscent là où elles ne sont pas invitées, vêtues de… fausses barbes (ha ha ha! maintenant c'est encore plus drôle) et qui viennent rappeler à nos mâles politiques et nos mâles dirigeants (les vieilles barbes - re ha ha ha!) à quel point les femmes sont exclues de leurs cénacles.
On peut voir toutes leurs actions filmées sur toitube ou sur leur site. Mais on a choisi celle-ci, au Sénat, parce qu'elle fait intervenir le à jamais tristement célèbre Gérarda Longuet, qu'on avait déjà vu en action au même Sénat, sur ce même blog tatoué et fumeur, mais cette fois à propos de l'homosexualité.
Attention, vous êtes prié(e)s de ne rater aucun des propos de Gérarda Longuet, merci.

"Rebondir sous les coups"

Il est 11h30, les Bleus atterrissent à l'aéroport du Bourget - comme ça, ils sont sûrs de ne pas se faire lyncher par la foule à leur arrivée. N'empêche, on reste fasciné, sinon sidéré, par l'aspect très symptomatique de cette histoire. Certes, comme le dit Daniel Cohn-Bendit, dans mon journal aujourd'hui: symptomatique de "l'état de non-fonctionnement du multiculturalisme d'une société profondément divisée", l'ampleur de l'individualisme et du je-m'enfoutisme qui sapent les solidarités. Mais à nos yeux symptomatique également de cette Rance qui a ce besoin impérieux, quasi vital et a priori contradictoire, d'une part de se rassembler, mais d'autre part de se réunir pour trouver un coupable. Cette Rance qui se lance tête baissée dans la condamnation, que dis-je, l'anathème sinon la mise à mort de son équipe nationale. Comme si la nation dans son entier s'était EN-FIN trouvé un bouc émissaire, le responsable de tous ses maux. EN-FIN la nation a un ennemi commun tout désigné que le peuple dans son entier peut abhorrer à l'envi, sur lequel il peut cracher à discrétion. Et même si on ne va pas prendre le parti de joueurs désaxés, mugir avec cette meute nous semble d'une facilité sinon grégaire, en tout cas suspecte.

Bref. Pour saluer le retour des Bleus, on va écouter ce morceau découvert hier sur toitube, intitulé identiquement Les Bleus, interprété en 2006 par la pourtant hyper vulgos Régine, mais composé par Gainsbourg. Une chanson qu'on ne connaissait pas, qu'on trouve superbe, pas mal chantée du tout par la voix cassée de Régine en question (on reparlera sans doute un jour des chansons que Gainsbourg a composées pour elle tant elles sont gratinées!) - et qui illustre enfin ce à quoi les rateurs de ballon rond doivent et vont devoir affronter, à savoir, comme le dit la chanson: "rebondir sous les coups".

Like I love you

Je traduis:
Elle me sourit et prend la direction de la maison. Moi: Julia? Elle s’arrête. Je lui dis: On ne peut pas passer son temps à haïr les gens, Julia. Ce n’est pas bon. Ce n’est pas bon et ce n’est pas bien.

Et, forcément, on pense (et particulièrement en cette journée) à cette chanson: To Love Somebody dont on apprend à l'instant qu'elle a été composée par… par… les… les… Bee Gees! Les Bee Gees! Eh ouais… Désolé de casser un mythe. Pourtant c'est pourtant vrai. Le morceau figurait sur leur troisième album, de 1967.
On va en écouter deux trois versions (selon allmusic.com, le morceau a été pressé sur 527 disques!), toutes les trois de 1969.
Donc, non, désolé, je suis franchement marri, mais on n'écoutera pas celle de Bonnie Tyler, ni celle de Kim Carnes, et encore moins celle de Rod Stewart. De même, on n'écoutera pas celle de notre pourtant chérie Dusty Springfield qui ne présente pas grand intérêt, hélas - on peut toujours y jeter une oreille ici.

La première, imp-ec-cable, indémodable, une des plus célèbres, par Nina Simone, qui date de 1969, avec ce son Motown qu'on adore (aaah! ces chœurs féminins!):



La seconde, qui n'est pas notre préférée, est celle de Janis Joplin, mais on la met pour Janis († RIP) parce qu'on ne saura jamais assez lui rendre hommage et justice pour avoir été la première femme de l'histoire de la musique rock à se libérer de l'emprise masculine.



Enfin, et évidemment, en version ska/reggae, on ne va pas écouter celle de Rita Marley, ni celle de Bunny Scott. Mais bien celle de Busty Brown, produite par Lee Perry - lequel a gardé les chœurs féminins qu'il a même rehaussés sur lesquels il a enfin plaqué ce son revive qu'on adore avec cet orgue Hammond toujours aussi entêtant (et sans oublier les accords de basse!).

L'opium du peuple

On l'avait soi-même oublié mais, dans toute sa générosité, M. y a pensé. C'est la Saint-JB aujourd'hui. Ça nous fait une belle moche jambe de s'appeler comme le prédicateur et baptiseur du dealer d'opium du peuple - mais bon. D'autant que si on regarde sur toitube, on tombe sur ce dessin animé de propagande sur la vie du Saint en question. Ça nous donne la gangrène des oreilles et le cancer des yeux de devoir montrer et regarder ça mais, comme on disait autrefois à Act Up-Paris, "Connaissez vos ennmis!" Dont acte:



Alors opium du peuple pour opium du peuple et animation pour animation, JB préfère évidemment de loin, de très loin même, ce dessin animé soviétique de propagande, datant de 1929, et qui, encore en plus, parle de Mars et de science-fiction (un des autres dadas de JB) et de la libération des Martiens, par les héros révolutionnaires, du joug capitaliste - et toc!

"I tried my best"

Et on se réveille ce matin même plus comme les poules, non, avant les poules. On ouvre les yeux sur une ciel bleu clair et le cri d'un corneille, cependant que, déjà, dans la tête, résonne Tonight de Keith & Tex. Normal, se dit-on, on les a écoutés toute la journée de la veille, assez épaté en fait par la qualité de leur musique (puisque, oui, ils ont composé autre chose que le célébrissime et parfois un peu usé Stop That Train). La musique du matin est donc une musique d'hier - hier mercredi où l'Allemagne s'est qualifiée sans faire un beau match; mais aussi hier: 1967. Tonight est également une chanson très connue de Keith & Tex, un morceau de rocksteady pur jus, tant par la musique (au tempo ralenti et, marque de fabrique des deux garçons, à la guitare dominante) que par les paroles, une chanson sur un amour contrarié ainsi que ce genre nous en a produit par centaines: "I tried my best to show you that I love you, but you were untrue / I don't know why you lied, but you lied to me." Aïe aïe aïe. Ça commence mal notre histoire (d'amour), hein… Maiaiais nan! Puisque Keith & Tex, pas rancuniers, et c'est là-dessus que s'ouvre puis se ferme la chanson, implorent l'être aimé en ces termes: "Why won’t you come home / Tell me that you love me / Tonight, tonight, tonight."
Ouf! Bon, pour notre part, ce soir comme déjà maintenant, la porte reste grande ouverte, hein.
Et une bonne journée surtout.



Und man wacht auf, nicht einmal wie die Hühner, nein, vor ihnen. Man öffnet die Augen auf einen hellbaluen Himmel und das Geschrei einer Krähe, während Tonight ,von Keith & Tex schon im Kopf austont. Das ist ganz normal, denkt man: man hat sie den ganzen gestrigen Tag gehört, letzendlich ziemlich imponiert von der Qualität ihrer Musik (seitdem sie, ja, was anderes als das hyperberühmte und manchmal a bisserl ausgehörte Stop That Train komponiert haben). Die Morgenmusik ist also eine Gesternmusik: gestern Mittwoch, wo Deutschland mit keinem schönen Sieg gewonnen hat; aber auch gestern, das heisst 1967. Tonight ist auch ein sehr berühmtes Lied von Keith & Tex. Ein pures Rocksteady-Stück, von der Musik aus (mit diesem ausgebremsten Tempo und, Kennzeichen der beiden Burschen, einer dominierenden Gitarre) sowie von den Texten aus: ein Lied über eine unglückliche Liebe wie dieses Genre uns hunderte und hunderte Stücke produziert hat: "I tried my best to show you that I love you, but you were untrue / I don't know why you lied, but you lied to me." Auer. Die fängt gar nicht gut an, unsere (Liebes)Geschichte. Aber neiiin! Weil Keith & Tex üüüberhaupt keinen Groll haben. Mit diesen Worten öffnet und schliesst sich nämlich ihr Anflehen: "Why won’t you come home / Tell me that you love me / Tonight, tonight, tonight."
Gerettet!
Was uns betrifft steht heute Abend sowie umgehend jetzt die Tür ganz offen.
Und einen schönen guten Tag vor allem Ding!

mercredi 23 juin 2010

WM/Mondial: Der Franzi!

Allez, dans une demi-heure, l'Allemagne affronte le Ghana et, pour donner à la Nationalmannschaft tout le courage dont elle a (besoin), on va entonner l'immarcescible (au moins…) chanson de Franz Beckenbauer avec ses poteaux de l'équipe allemande, anno 1966. On tend bien l'oreille pour ne rien louper de son accent bavarois à couper au couteau et on ouvre bien grand ses mirettes ou se délecter de son air timoré de post-adolescent. Au fait, la chanson s'appelle Gute Freunde Kann Niemand Trennen, ce qui veut dire: Personne ne peut séparer de bons amis. Ça c'est sûr, hein.

So, Leute! Um eine halbe Stunde spielt Deutschland gegen Ghana und, um die Nationalmannschaft all die Mut zu geben, die sie braucht (und hat), lass uns das (minnndestens) unersättliche Lied von Franz Beckenbauer singen, das er selbst mit seinen Kickergutefreunde(kannniemandtrennen - so der Titel des Liedes), und wir sind zurück in 1966. Man öffnet seine Ohren ganz ganz gross um den wundervollen Akzent des Franzi zu hören und genau so ganz ganz gross seine Augen um sich seine scheue und postpubertäre Allüre anzuschauen.

Le langage et le vocabulaire qu'on utilise

C'est quand, déjà, que je parlais de genre, sexe et traduction?
Ah ouais. Y a pile une semaine.
Je faisais un méga lapsus de mec.

Et je viens d'en refaire un.
Un pas piqué des hannetons.

J'étais censé traduire:
Julia a le soleil dans les yeux (…)
J'ai traduit:
Julia a le soleil dans les deux (…)
Ouiii…

On fait quoi pour se faire pardonner?
Et puis non. On se fait pas pardonner, c'est un terme du langage religieux - on se fait excuser, on demande à autrui d'accepter nos excuses.

Alors on fait quoi?
Allez, on ressort nos anciennes copines de L7 qui chantent, en 1993, Wargasm.
Et qui on voit, assis sur la scène? Assis côte à côte? Non? Si! Kurt Cobain et Courtney Love. Kurt Cobain… (soupir…) Kurt Cobain… (re-soupir…) Kurt Cobain († RIP).
Allez, cette fois on écoute le womyn* power des L7, avec la batteuse en slip et en soutif - génial! Et ça parle de quoi la chanson? Ça parle de nanas qui ont envie de baiser et qui baisent et qui en baisant déclarent la guerre aux mecs. Im-pec-cable! C'est par-fait! Ne changez rien.



* Womyn avec un Y puisque les féministes américaines refusent d'employer le terme women à cause du E qui fait penser à men = les hommes (= les mâles). Donc womyn pour complètement démasculiniser non seulement la réalité mais la taxinomie, la terminologie. Angela Davis ne disait pas autre chose hier, à propos d'autre chose. Elle disait à propos des années 60, comme quoi vers la fin des années 60 ils [les militantEs noirEs et homosexuelLEs] n'avaient pas forcément conscience, ne prenaient pas forcément conscience de la lutte à mener pour leur libération: "We wouldn't perhaps have the vocabulary, and there's always been a struggle over langage, over vocabulary (…)"
Voilà c'est exactement ça: la prise de conscience du langage et du vocabulaire. Le langage et le vocabulaire qu'on utilise. Au quotidien. La prise de conscience de soi, la prise de conscience de soi par rapport à l'autre, au groupe aux "institutions" (pour reprendre le terme d'Angela Davis) qui nous excluent, la prise de conscience de sa différence par rapport à une normativité (qu'elle soit homo ou hétérosexuelle, qu'elle soit politique (quand on est d'extrême-gauche) ou sociale (quand on appartient à une classe prétendument inférieure)) - cette prise de conscience passe d'abord par le langage et le vocabulaire qu'on utilise. La libération de soi passe d'abord par le langage et le vocabulaire qu'on utilise. La traduction passe d'abord par le langage et le vocabulaire qu'on utilise. La bonne traduction passe de toute façon et avant tout par le langage et le vocabulaire qu'on utilise.

Hystérie maternelle

Quel plaisir d'avoir la chance de de traduire ce passage à la fois tordant et effrayant.
Le contexte: une mère et sa fille, cette dernière doit avoir vingt à vingt-cinq ans, c'est elle la narratrice.

Elle pivote vers moi. Elle a les yeux rouges. Elle me demande: Tu restes à la maison ce soir? Moi: Non, j’ai un rendez-vous. Elle tourne la tête à nouveau, fixe le téléviseur. If it wasn’t for that stupid little dog, dit l’homme pendant que les sous-titres indiquent : «Si ce n’avait été pour ce stupide petit chien.» Tu veux que je reste à la maison? je demande pendant que l’homme dit maintenant: You tell him! Maman me regarde sans comprendre, avant de dévier les yeux vers l’écran. Et là, c’est plus fort que moi, je ne peux pas m’en empêcher, je lui dis: J’y ai sérieusement réfléchi et… voilà… j’ai l’intention de déménager. Maman me dévisage. Longuement. J’ajoute: J’ai visité un appartement. Elle: Je ne crois pas que ce soit très malin de ta part, Helene. Tu vas te retrouver toute seule comme une âme en peine et tu vas t’ennuyer. Moi: Mais le loyer n’est que de deux mille cinq cents couronnes… Elle: Alors que tu ne devrais pas… Franchement je ne comprends pas! Moi: Non mais… punaise, quand même! Elle: Oui? Moi: J’aurai ma salle de bains individuelle… Elle: Je te signale que personne ne le remarquera, si tu rentres ou pas chez toi le soir. Ce qui signifie que, dans l’éventualité où tu te fais violer, tu pourras toujours courir pour trouver de l’aide! Et je ne te parle même pas de l’aspect financier. Comment tu vas te débrouiller financièrement, hein? Avec le loyer, l’électricité, la nourriture, les vêtements, le téléphone? Je te préviens, ma petite: si tu quittes la maison, ne compte pas sur moi pour payer ta facture de portable ou tes fringues! Songe: les serviettes hygiéniques coûtent à elles seules cent couronnes par mois! Cent! Moi: Du calme, maman, voyons!… Je vois à présent quatre personnes dans l’écran. Je dis: Il existe des serviettes hygiéniques moins chères que les bios. Je ne suis pas forcée d’utiliser des serviettes bios. Elle: Excuse-moi, Helene, mais là tu es complètement à côté de la plaque! Elle fixe l’écran en me lançant ça. Definitely not, dit un homme dans le poste, et les rires enregistrés de se déverser au même moment. Maman: Tu vas te sentir très seule, Helene, très très seule. Elle lâche un ricanement moqueur en me lançant ça. Parce que tu aimes vivre toute seule, Helene? me demande-t-elle. Non, rétorque-t-elle sans attendre ma réponse. Tu n’aimes pas ça du tout. Je te connais suffisamment. Si jamais tu déménages, tu vas devoir t’en enquiller, de longues soirées où tu te sentiras délaissée et abandonnée. Moi : Oui, mais il faut voir aussi les côtés positifs… Elle: Les côtés positifs? Ha! Parlons-en! Personne à côté de qui te réveiller le matin. Personne pour te dire de te lever. Personne pour te préparer ton petit déjeuner. Les rires enregistrés fusent une nouvelle fois. Elle: Je ne le ferais pas si j’étais toi, Helene. Attends au moins quelques années d’avoir trouvé un emploi décent et d’avoir mis un peu de sous de côté. Et à ce moment-là, on pourra étudier la situation d’un œil neuf, voir si je ne peux pas t’aider un peu financièrement. Est-ce que tu connais le prix de la nourriture, Helene? Combien il faut débourser chaque jour de l’année et combien ça coûte, tout mis bout à bout? Est-ce que tu le sais? Combien coûte un fromage pâte cuite, Helene? Et qu’est-ce que tu feras quand tu rentreras du travail? Tu ne trouveras personne qui t’attend avec le dîner sur la table. Personne pour t’écouter raconter tout ce qui s’est passé au bureau. Moi: Oui, mais c’est de ça que j’ai envie… J’ai beau dire et j’ai beau faire, je comprends que c’est inutile. En plus, je n’ai aucun argument à lui opposer. Elle continue: Helene, qu’est-ce que tu as à ne pas vouloir écouter les gens qui ont plus d’expérience de la vie que toi, hein? Explique-moi. Comment peux-tu en savoir davantage que moi? C’est juste quelque chose que tu crois. Parce que, s’il y a quelqu’un qui est bien placé dans cette pièce pour le savoir, c’est moi! Je dis: Oui mais l’expérience, ça s’acquiert… On peut apprendre… C’est bien d’apprendre en fonction de ce qu’on a fait… Elle: Alors là, si on devait tout apprendre en fonction de ce qu’on a fait, je peux te t’assurer qu’on ne ferait pas les choses bien! Non, on ferait mal. Mal mal mal! Mais pourquoi tu refuses de m’écouter quand je te dis que ta décision est idiote? En plus, tu n’auras jamais les moyens d’aller au cinéma, de manger au restaurant, de t’acheter des vêtements neufs. C’est cher de se nourrir, Helene. Et sans parler des petites choses auxquelles tu ne penses pas: le papier hygiénique, le shampoing, le jus d’orange, le lait… Et j’en passe, et j’en passe. Ça fait beaucoup d’argent. Et la poudre à laver? Tu y as pensé? Et si tu avais un besoin urgent de quelque chose? Une machine à laver, par exemple? Comment tu feras, hein? Moi: Ben… je peux apporter mon linge sale et le laver ici…? Elle sourit, secoue énergiquement la tête et répond: Ici? Non. Non, non, non et non! Ma maison ne va certainement pas se transformer en laverie, ma cocotte! Si tu pars d’ici, tu le fais dans les règles! Moi: Mais en général, dans les immeubles locatifs, il y a une buanderie collective au sous-sol… Elle: Une buanderie collective au sous-sol? Ah bon? Première nouvelle. Parce que tu crois qu’une buanderie collective va être la solution à tous tes problèmes? Mais tu te fourres le doigt dans l’œil, Helene! Et qu’est-ce que tu feras si tu as besoin d’un nouveau téléphone portable? Et comment tu feras pour payer tes tickets de bus, hein? Moi: Il faut que j’économise davantage, c’est tout… Elle: Helene, je t’en prie, écoute-moi. Je te parle en connaissance de cause, parce que je suis moi-même passée par là… Le générique de fin défile sur l’écran, au rythme d’une musique guillerette. Elle continue: Ce n’est pas pour être méchante si je veux te dissuader de quitter la maison. Mais je ne comprends pas pourquoi tu tiens coûte que coûte à le faire quand tout, et je dis bien tout, indique que tu ferais mieux d’attendre un petit moment avant de partir d’ici. Et ne va pas croire que tu peux t’enfuir à toutes jambes d’ici et revenir comme bon ça te chantera! Ah ça non! Si tu pars d’ici, très bien, tu pars d’ici, point à la ligne. Dans ce cas tu me remets ta clé et tu viens en visite que si et seulement si tu y es invitée! Je fais mine de partir, elle se lève pour m’emboîter le pas, me suit jusque dans le couloir, dit: Et je te préviens, hein, ne compte pas sur moi pour te prêter de l’argent! Moi: Non, maman… Je monte les marches. Des photos de moi enfant partout dans l’escalier. Ce n’est pas sain d’être là, partout: moi en train de manger une glace, moi sur le pot, moi moi moi… J’entre dans ma chambre. Et là qu’est-ce que je vois? Non, j’y crois pas… Un poster au-dessous de mon lit, un pur-sang arabe lancé au galop dans un champ, ça doit faire plus de dix ans qu’il est accroché au mur et je ne m’en rends compte que maintenant.

© Gjøre godt, Trude Marstein, Gyldendal Forlag, 2006
© Faire le bien, traduit par Jean-Baptiste Coursaud, éditions Stock, 2010

Le ballon rond de la Rance

Raymonda nous envoie sa chronique foot quotidienne, pour le plaisir de nos yeux ravis et cite notre ministre des Spores, øøø, flûte, mais pourquoi je me trompe le temps-euh?!? Donc elle cite la ministre des Sports en ces termes (et on avait pu déjà apprécier ici la perspicacité et la véracité des analyses spor(e)tives de l'Angéroise):
«Le football, ce n’est qu’un jeu, mais c’est aussi un enjeu», Roselyne, candidate au bac philo.
«Les responsables de ce désastre devront rendre des comptes», Roselyne, Colonel Moutarde, ministère du cluedo.

Allez, pour se réconcilier avec le ballon rond de la Rance, on regarde un extrait du beau film de Douglas Gordon et Philippe Parreno consacré à Zinedine Zidane (Zidane, un portrait du XXIe siècle, 2006) - rythmé par un morceau de Mogwai qui fait, il faut l'avouer, de la très belle musique électronique.