mercredi 9 juin 2010

"I'm here"

On traduit ce passage, entre une thérapeute et son mari:
Moi: Dis-moi, Gunnar… Il lève les yeux de son journal. J’explique: J’ai une mère et une fille comme sujets. Et ce dont elles parlent surtout, c’est d’elles deux. Gunnar: Ensemble? Moi: Non non, elles ont chacune leurs séances. Elles ne sont pas au courant qu’elles me consultent l’une comme l’autre. Et leurs problèmes m’apparaissent avec une clarté évidente, mais je ne peux pas le leur dire directement. Gunnar: Tu as le droit? Moi: Absolument. Tant que je garde le secret professionnel. Gunnar: Mais tu imagines si elles apprenaient au sujet de l’une et l’autre? Moi: Elles ne l’apprendront pas. Je veille évidemment à ce que leurs séances ne se succèdent pas. Et puis la fille de la réception comme les autres collègues psychologues sont informés. Ça nous amuse d’ailleurs… Sans que ce soit méchant de notre part, cela va de soi.
Et on se dit que les thérapeutes norvégiens ont des pratiques bien étranges… Il serait impensable en France pour un(e) thérapeute d'avoir comme sujets deux personnes qui se connaissent, d'autant plus une mère et sa fille. Enfin bon, nous sommes dans la fiction. Et Vera, la thérapeute en question, est elle-même troublée par son attitude, signe qu'elle n'est franchement pas à l'aise avec la situation.

Puis, immanquablement, on repense à la série In Treatment et surtout à la justesse de Dianne Wiest qui y incarne une analyste, qui y incarne l'analyste superviseur de l'analyste interprété par Gabriel Byrne. Tout dans le jeu de Dianne Wiest est exceptionnel, restitue avec une perfection presque troublante l'attitude d'un(e) analyste: les silences et les souffles et ces "oui" tous comme autant de techniques pour révéler et rehausser le discours de l'analysant; mais aussi la quasi-absence obligée des expressions du visage, pour ne pas influer sur le récit de l'analysant ou quand elles sont présentes afin au contraire, et encore une fois, de marquer les singularités du discours de l'analysant. Du coup, on se dit qu'il y a dans l'attitude de l'analyste une similitude frappante avec le jeu d'un acteur de cinéma: la moindre expression à l'écran comme en face de soi devient signifiante sinon "sursignifiée", le moindre trait ou geste superflu peut devenir fatal tant pour le spectateur que pour l'analysant.
Bref, Dianne Wiest subjugue et on la regarde illico, avec un serrement de gorge quand elle dit à Paul, sans le quitter un instant des yeux: "Whatever you tell me, I'm here for you. I won't abandon you. No matter what. I'm here."

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