mercredi 7 avril 2010

Statut

Je dois traduire cette phrase, dans le roman de Trude Marstein, Faire le bien (eh oui…, à cette période de la vie):
Dette gikk jo fint Ine-mor, sier hun.

Mor, en norvégien, ça veut dire mère et maman. Mais c'est aussi un terme affectueux, pour dire ma chérie. Or la scène est particulière: C'est la mère qui s'adresse à sa fille, elles sortent de l'église où l'enfant d'Ine vient d'être baptisé. 
L'auteure envoie ici comme un message subliminal sinon au lecteur, à tout cas à sa narration. D'emblée, elle place son histoire sous le signe de la maternité. La fille qui vient d'avoir un enfant et est devenue mère. La fille par rapport à sa propre mère. La fille qui doit se projeter dans sa maternité, dans le fait d'être désormais une mère. Cette même fille qui doit réagir par rapport à sa propre mère et celle-ci qui doit réagir, en tant que mère, face à la maternité de sa fille, de sa fille devenue mère. 
Voilà le contexte psychologique du passage.
Et voilà pourquoi ce mot mor devient si important.
Mais comment le traduire?

La solution: renverser le problème. Poser non pas la maternité et le statut de mère dans le choix lexicographique, mais y plutôt inscrire la filiation et souligner son statut de fille. Dire, comme on le dit justement en français, pour marquer aussi son affection: ma fille. En disant ma fille, à sa fille, pour dire ma chérie, la mère la fige à jamais dans son rôle de fille. Il n'y aura qu'un mère: elle, la grand-mère donc. Sa fille, la mère du petit garçon, ne sera jamais une mère aux yeux de la grand-mère, elle demeurera celle-ci: une fille. Dans tous les sens du terme.

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